Lettre d'info du centre des Maladies Neuromusculaires N°5

Apports du séquençage d’exome dans le diagnostic génétique : illustration par 2 publications : d’après : Cossins J, Belaya K, Hicks D, Salih MA et al.Congenital myasthenic syndromes due to mutations in ALG2 and ALG14. Brain.2013 Mar;136(Pt 3):944-56 et Melià MJ, Kubota A, Ortolano S, Vílchez JJ, Limb-girdle muscular dystrophy 1F is caused by a microdeletion in the transportin 3 gene. Brain. 2013 May;136(Pt 5):1508-17


Le séquençage d’éxome est une nouvelle technique d’analyse génétique permettant d’établir la séquence des parties codantes (lues pour fabriquer les protéines) de l’ADN. Cette technique, qui n’est pas encore employée en routine, va permettre d’identifier de nouvelles anomalies génétiques dans des maladies neuromusculaires familiales. Par ailleurs, dans ces maladies polygéniques, l’analyse globale de l’ADN permettra très probablement d’arriver plus vite à la détection de la mutation et donc du gène en cause alors qu’à l’heure actuelle, l’analyse est effectuée un gène après l’autre (maladie de Charcot-Marie-Tooth, myopathies des ceintures, ataxies spino-cérébelleuses, paraparésies spastiques héréditaires…).

Ceci est illustré par 2 publications parues dans Brain récemment. La première (Collins et al.) rapporte les caractéristiques des patients atteints de mutations de gènes ALG14 et ALG2 avec un syndrome myasthénique congénital autosomique récessif. Les patients mutés pour ALG14 présentaient une atteinte d’allure myopathique des ceintures à partir de 7 ans, sans atteinte oculaire ni bulbaire. La fatigabilité motrice avait fait pratiquer un EMG qui avait noté un décrément, et le diagnostic de myasthénie auto-immune avait été posé, d’autant plus que les patients étaient améliorés par la pyridostigmine. Les patients des deux autres familles avec mutations d’ALG2 souffraient soit d’un tableau proche de la myopathie d’Ullrich (début précoce, rétractions articulaires proximales et hyperlaxités distales) dans la famille 2 ou d’une atteinte myopathique plus classique, moins précoce et moins évolutive (famille 3). Là encore, aucune atteinte oculaire ou bulbaire n’était rapportée. Il faut noter enfin que l’ensemble des patients chez qui cet examen avait été pratiqué avaient un décrément à l’EMG et que tous avaient tiré bénéfice des anticholinestérasiques. ALG14 et ALG2 codent pour des protéines intervenant dans la glycosylation du récepteur à l’acétylcholine, qui serait essentielle pour son expression à la membrane.

La seconde étude (Melia et al.) rapporte la découverte de l’implication du gène TNPO3 codant pour la transportine 3 dans le cadre d’une myopathie des ceintures autosomique dominante (LGMD 1F). L’expression clinique ne se distingue guère des autre myopathies des ceintures, avec une atteinte à prédominance pelvienne. En revanche, la biopsie peut orienter, avec des noyaux larges avec une pâleur centrale qui n’ont été retrouvés par les auteurs dans d’autres myopathies.
En conclusion, ces 2 papiers sont sans doute les premiers d’une longue série. L’avancée majeure représentée par le séquençage d’éxome va en effet permettre d’identifier de nouveaux gènes et d’arriver plus vite au diagnostic génétique.


Test au glaçon et myasthénie auto-immune : l’étude qui jette un froid. D’après Fakiri MO, Tavy DL, Hama-Amin AD, Wirtz PW. The accuracy of the ice test in the diagnosis of myasthenia gravis in patients with ptosis. Muscle Nerve. 2013 Mar 28.


Le test au glaçon consiste à rechercher l’amélioration d’un ptosis après application d’un glaçon sur la paupière pendant deux à cinq minutes. Sa positivité est en faveur d’un ptosis myasthénique. Cette étude reprend les résultats du test chez 31 patients consultant pour un ptosis et montre que ce test a surtout une valeur d’élimination lorsqu’il est négatif. En effet, parmi les 16 patients avec un test négatif (pas d’amélioration du ptosis), 15 n’avaient effectivement pas une myasthénie sur la base des autres examens (EMG, recherches d’anticorps). En revanche, 11 des 15 patients positifs avaient une myasthénie, c'est-à-dire que 4 patients positifs avaient un ptosis d’une autre cause : deux patients avaient un ptosis « mécanique », un patient présentait une déhiscence du releveur et un patient avait un ptosis de cause inconnu.


Ainsi, contrairement à l’idée répandue, le test au glaçon est surtout intéressant pour remettre en cause une myasthénie lorsqu’il est négatif. Bien évidemment, quelque soit son résultat, ce test ne suffit à établir ou éliminer le diagnostic et doit être complété par les données EMG et de la recherche des anticorps.